Un petit CR de nos vacances en mars 2018 à Tasiilaq
Toujours les mêmes questions qui reviennent dès le mois d’octobre : où partir randonner en ski en mars et surtout avec qui…
Le groupe se monte au fil des demandes et des propositions : ce sera avec une ancienne camarade de promo qui fera sa première rando en ski/pulka ; à la salle d’escalade de Gap je rencontre un second partenaire qui a déjà de l’expérience dans ce genre de voyage. Eux ne se connaissent pas, ils se verront le temps d’un repas avant le départ.
Reste le choix de la destination, on est tous d’accord pour le Groenland et notamment pour un tour sur la presqu’île de Nugssuaq au sud d’Uummanaq. Mais mi-janvier 2018 le fjord d’Uummanaq n’est pas pris par la banquise, et suite à des échanges avec des locaux ceux-ci confirment que la situation n’est pas terrible mais qu’en mars la banquise sera probablement là …sauf si. Nous commençons à douter : on n’aimerait pas se retrouver sur la petite île d’Uummanaq avec une banquise trop fine pour le ski mais trop épaisse pour un éventuel transfert en bateau. Fin janvier, il faut se décider, et nous laissons tomber Uummanaq pour finalement choisir la côte Est : Kulusuk ou Ittoqqortoormiit. La seconde destination est un peu plus dure à atteindre, outre 2 correspondances en Islande les vols ne sont que le mardi et le jeudi ce qui rend difficile d’optimiser la pose des congés. Ce sera donc Kulusuk.
Pour moi qui ai déjà visité la région plus jeune en mars 2007, ce sera l’occasion de tester ma mémoire.
Nous achetons les billets fin janvier Paris-Reykjavik avec IcelandAir et Reykavik-Kulusuk avec Air Iceland.
Reste l’itinéraire, les grands glaciers des montagnes juste au nord du village de Kuummiut (à 50 km au nord de Kulusuk) semblent un beau terrain de jeu. Reste aussi à organiser le transfert jusqu’à Kuummiut ; les agences contactées nous répondent qu’on verra sur place le jour même si quelqu’un a un bateau à l’eau. Nous dessinons alors les grandes lignes du périple : 2,5 semaines pour relier Kuummiut à Tasiilaq.
Pour ce qui est des ours, ils sont apparemment plutôt rares dans le coin mais plusieurs récits sur internet mentionnent des observations et même des contacts (visite de campement…) dans toute la région. En effet, des plantigrades dérivent du nord avec les plaques de banquises, on nous conseille d’ailleurs de prendre un fusil sur place.
Lundi 19 mars (J-1)
La météo se précise pour la fin de semaine où nous serons sur place : grosse tempête pendant au moins 3 jours avec vents moyens à 20 m/s. Petit moment de doute, est-il raisonnable d’aller à Kuummiut sachant que de là il y aura 180 km obligatoires à parcourir pour revenir en ville. Nous préférons jouer la prudence et nous réservons au dernier moment la navette hélicoptère entre Kulusuk et Tasiilaq. Sur place, dans la grosse ville du coin nous pourrons mieux aviser sur notre destination : boucle au départ de Tasiilaq si la mauvaise météo se confirme ou transfert en bateau à Kuummiut si le temps s’améliore.
Mardi 20 mars, mercredi 21 mars, jeudi 22 mars
C’est parti pour le grand voyage : Chorges-Lyon en voiture le mardi soir. Mercredi Lyon-Roissy en TGV, Roissy CDG-Keflavik en avion, nuit d’auberge en Islande. Longue marche jusqu’à l’aéroport de Reykjavik. On n’est pas trop de trois pour porter les 3 pulkas, les skis et tout le matériel y compris glaciaire (cordes, crampons, baudrier…). L’avion décolle pour Kulusuk sous le soleil islandais et à peine 1h30 plus tard nous voici enfin sur place à 10 h heure locale. Le temps est très couvert. L’hélico est à 15h ; on refait les bagages pour équilibrer les poids et profiter de l’absence de contrôle de sécurité pour mettre les choses lourdes en bagages à mains (crampons, hache…). A Tasiilaq nous donnons rendez-vous à Rasmus, contacté avant le départ qui gère l’agence Greenland Vacation et qui doit nous louer un fusil, un chien et peut être nous transférer à Kuummiut. Il confirme nos craintes, dans deux jours la tempête arrive, il nous propose cependant un plan : nous emmener en motoneige jusqu’au front de banquise de l’île de Qernertivartivit et de là un ami à lui nous emmènera en bateau à Kuummiut. Nous n’hésitons pas longtemps. Vu la météo nous allons nous retrouver coincés plusieurs jours sous la tente juste après le départ. Nous décidons de partir pour une boucle au départ de Tasiilaq. Nous attaquons les courses au Pilersuisoq qui ferme dans 45 min… Evidemment, vu la quantité de choses à acheter nous ne finalisons pas tous nos achats et nous partons vers l’extrémité nord de la ville pour monter le camp à l’écart. Rasmus nous rejoint au campement pour nous emmener le chien et le fusil. Nous rencontrons donc le 4ème compagnon : Storm un chien groenlandais plutôt massif mais très calme. Rasmus nous explique comment l’attacher, lui mettre son harnais, ses sacoches de portage remplies de croquettes et nous montre comment charger le fusil. Il commence à se faire tard, Rasmus nous laisse et Storm commence alors à pleurer et toute la nuit ses hurlements nous empêchent de dormir. Nous découvrirons plus tard qu’il suffisait de sortir avec une pelle en criant « Storm ».
en voyant la mention « Sold Out » à beaucoup de dates mais à l’aller comme au retour l’avion était loin d’être rempli.
La région :
Les paysages sont magnifiques, très alpins avec des montagnes aux formes très élancées. Les nombreux glaciers qui les couvrent semblent propices au ski et chaque apparition du Sermilik mérite une pause contemplation.
Pour la banquise, la plupart des fonds de fjord et des baies étaient pris, le Sermilik et le fjord d’Ammassalik étaient impraticables voire complètement en eau pour le dernier.
La météo est quand même capricieuse, heureusement nous avons bénéficié de l’anticyclone lors de la partie la plus belle du voyage mais la fenêtre de beau temps entre deux tempêtes semble se limiter à quelques jours.
La température a globalement été clémente, autour 0°C/-5°C en journée et un peu plus froid les nuits ou le ciel était dégagé : -15°C.
Logistique
Nous sommes avons loué le chien et le fusil chez Greenland Vacation tenu par un danois qui réside sur place. Tout s’est très bien passé. Depuis la France, nous avons eu des réponses complètes et très rapides depuis la France (souvent dans la journée) à nos questions. Sur place le matériel était déjà tout prêt, Rasmus a pris soin de nous expliquer point par point chaque opération nécessaire à l’utilisation du fusil et à la randonnée avec un chien. Bref, nous recommandons.
Matériel
C’est celui d’une randonnée en ski nordique classique : chacun sa pulka (le bac bleu Snowsled), son brancard et sa paire de skis.
Pour le couchage : une tente 4 places Mountain Hardwear Trango 4 (dont les portes à ouverture de bas en haut ne sont vraiment pas pratiques), deux réchauds MSR Universal un fonctionnant avec de l’essence C, l’autre au gaz inversé. Celui au gaz a été beaucoup moins efficace. A noter qu’on trouve très facilement de l’essence C en bouteilles vertes de 50 cl avec noté « Benzin » dans les supermarchés.
Pour l’orientation : GPS, balise Spot et les deux cartes au 1/100 000 qui couvrent la région. Le matériel pour glacier nous a bien alourdi tout le séjour (crampons, cordes, baudriers, broches…) mais le jour où il devra servir on sera content de l’avoir…
Les chaussures Fisher BCX 2017 ont comme l’année dernière montré leur limite (elles étaient pourtant neuves suite à leur remplacement sous garantie) : trous au niveau de la zone de flexion, casse de l’élastique de serrage de la guêtre intégrée et impossibilité de fermer la fermeture éclair dès que du givre se formait dessus (c'est-à-dire chaque matin…).
On a eu du réseau (Free) aux abords des villages.
Le prix :
Le voyage a couté 2200 euros par personne au départ de Paris dont 1300 pour l’avion, 300 pour l’hélicoptère, 200 de transit en Islande (avec 3 nuits de chambre en auberges), 300 de courses sur place et 100 euros de location de chien et de fusil.
Le parcours :
Nous avons parcouru 115 km avec les pulkas et 150 en incluant les journées en étoile depuis le camp. Avec la tempête et la neige fraiche la progression a été vraiment difficile la première semaine. Au vu des expériences précédentes au Groenland j’avais tablé sur un parcours de 200-250 km avec pulka… La réalité fut donc bien différente. Il était tout simplement impossible de progresser pendant et après la tempête au vu des hauteurs neige.
Pour finir
Il aura manqué quand même manqué à ce voyage une touche d’isolement et d’engagement. Les conditions ne nous ont pas permis de nous éloigner de l’axe Tasiilaq-Tiniteqilaq très parcourus par les locaux et les touristes. Les montagnes et les vallées au nord du Tiniteqilaq semblaient être un peu plus sauvages.
Mais si il y’a une chose à retenir du Groenland c’est que tout y grandiose et magnifique peu importe ou l’on regarde et l’une des plus belles journées fut celle au sommet du Qaqqartivakajik à …2 km de Tasiilaq !
superbe, ça fait envie !