Nous n’abordons pas tous les activités de pleine nature (neige pour ce qui nous concerne) avec les mêmes attentes et nous n’avons pas tous les mêmes expériences.
C’est en autre pourquoi je pense que comparer raquette et SRN revient à comparer marche et VTT : ce sont des activités différentes.
Si, nombreux sont ceux qui préfèrent la raquette ou ont eu peur d’essayer le SRN, je dirais tant-pis pour eux.
Ceci étant dit pour mon épouse et moi, si l’on devait comparer ces activités sur une échelle de 10, il y aurait un net avantage pour le SRN (9/10) vs raquettes (2/10).
Comme cet énoncé est un peu brutal, je vais expliciter mes propos :
- Le seul avantage que je vois à un grand nombre d’adeptes du SRN, c’est que les équipementiers s’investiraient d’avantage dans le développement de matériel adapté, fiable et durable. Il leur faut un marché conséquent sinon, ils ne se creusent pas trop la tête et produisent de la daube comme Matshus avec ses chaussures Panorama (j’y reviendrai dans un autre post).
En dehors de ça et j’admets que c’est égoïste, mais comme j’aime bien la neige vierge, je préfère qu’il n’y ait pas trop de pratiquant !
Nous avons pratiqué la raquette, avant de faire du SRN avec des skis de fond, et avant de découvrir le matériel plus adapté au SRN. Je pense donc pouvoir évoquer les points négatifs des raquettes qui sont souvent résolus par le SRN :
- On marche les pieds écartés et on se les tord. (pas le cas en ski)
- C’est la misère dans les dévers. (nettement mieux avec des skis à carres)
- Une portance médiocre malgré que c’en soit le but ! Très fatigant dans la poudre à moins d’avoir des raquettes à très grand tamis ce qui accentue les inconvénients du dessus. (faire la trace à ski, l’est nettement moins compte tenu de la portance meilleure).
Ex : impraticable dans les zones où il y a beaucoup de genêts (comme en Lozère) alors qu’avec des skis on arrive à passer. Idem pour le franchissement de pont de neige au-dessus de ruisseaux et évidemment les sources diffuses (narces).
- Ça botte autant que des skis et là c’est très physique ! (plus que le ski)
- Vitesse de déplacement très lente (même en descente !) d’où des étapes réduites en distance ou un rayon d’action limité.
- Absence de plaisir de glisse et de sensations. (à ski, même en terrain légèrement montant l’on peut avoir cette sensation agréable de glisse à chaque pas).
Ceci n’empêche effectivement pas de passer une excellente journée en raquettes : on est au calme dans la nature, on a peu de chance de tomber et donc de se faire mal quelle que soit la pente et l’état de la neige (ce qui est un point positif).
Autre point positif : c’est mieux que le SRN en pente raide mais pour cela il y a le SRA.
Je dirais que la raquette est bien adaptée au débutant ou à ceux qui pratiquent peu. Mais au cours de la pratique, si ce n’est la forme physique, il n’y a aucune progression possible : c’est simplement de la marche ; qui de plus, pour la grande partie des pratiquants, se fait sur des parcours balisés (donc tassés) ou en file indienne derrière des accompagnateurs.
Cela correspond à un besoin, à une caractéristique de la société actuelle : aborder quelque chose de façon simple et rapide (comme par exemple la prise d’un renseignement sur google), sans chercher à creuser, à aller plus loin dans la démarche, à en savoir plus.
Effectivement, le SRN est moins facilement abordable car il demande une progression dans la pratique, ce que n’exige pas la raquette. C’est certainement une des raisons pour lesquelles le SRN est plus confidentiel et moins proposé par les organismes que la raquette (en plus du coût de l’équipement), mais ce n’est pas le seul.
En SRN, il faut effectivement persévérer comme l’a dit Régis dans le podcast. Mais nombreux sont les petits plaisirs dès que l’on prend de l’assurance et que notre éventail de technique s’améliore. Et ce panel de techniques est considérable : chasse neige, stem, pas tournant, dérapage, télémark, godille, chute maitrisée ; valables tant à la montée qu’à la descente : progression en escalier, utilisation de peaux, conversion, déchaussage, etc…
Peut-être parce que je suis aussi vététiste et kayakiste, je prends également beaucoup de plaisir à lire le relief et l’état du terrain (la neige). En raquettes cela présente peu d’intérêt (pour certains, cela peut être effectivement un avantage).
Pour rebondir sur certaines remarques de Vincent que je connais aussi en dehors du forum :
Le « N » de SRN signifie « Nordique » Dans les pays nordiques le ski est un « no brainer » par rapport aux raquettes en raison du relief, de la qualité et quantité de neige etc. Le « grand public nordique » adopte naturellement le ski car c’est l’option plaisir et facile là-bas.
Pour avoir fait de nombreux séjours en Finlande (je connais nettement moins Suède et Norvège), je peux affirmer plusieurs choses : ils pratiquent majoritairement le ski « pas de prise de tête » sur des pistes de fond (gratuites et nombreuses mais pas régulièrement entretenues comme les nôtres). Ils sont nettement moins nombreux à sortir des sentiers battus (ce qui peut expliquer le défaut rencontré avec les Madshus explorer). D’ailleurs jusqu’à peu, ils n’avaient pas le matériel adapté pour passer partout : leurs grands skis traditionnels avec des fixations faites de lanières et leurs grandes bottes étaient adaptés aux forêts et fonds de vallée. Impossible de gravir et encore moins de descendre des tunturis avec cet équipement. (pour ceux qui ne connaissent pas : là-haut, à partir de 300m d’altitude les arbres disparaissent et à 350m vous attaquez la « haute montagne » (ronde toute de même mais avec une neige soufflée, dure et bosselée).
Maintenant, avec le réchauffement climatique, encore plus ressenti là-haut que chez nous, la neige se transforme et devient identique à la nôtre, même dans les vallées et forêts.
Il n’en reste pas moins que les avantages de ce pays vis-à-vis du SRN sont les vastes étendues avec une très faible densité de population, un relief modéré (peut-être même un peu trop !) et la présence de nombreuses cabanes refuges (libres, équipées, respectées et donc en très bon état).
L’enneigement en France est effectivement plus aléatoire mais quelques centimètres suffisent à la pratique du SRN : Entre le 9 décembre et le 5 janvier la Margeride était praticable et j’ai fait 10 sorties ; d’autres massifs l’étaient également. Sur 5 cm de neige, inutile de sortir les raquettes, on fait de la marche (au pire on met des crampons-clou sous ses chaussures de marche) ; à ski même avec 5cm on glisse.
Je me suis également rendu dans une de nos petites stations de ski de fond histoire de changer un peu de mouvement (skating). Eh bien j’ai regretté car il n’y avait plus assez de neige pour que la machine repasse (la neige était dure et pleine de traces) ; au lieu de tourner sur quelques pistes, j’aurais mieux fait d’aller enjamber les barbelés pour skier au milieu des gros blocs de granit, sur les genêts, les ruisseaux, aller observer les traces d’animaux, etc…
je ne jette pas la pierre aux professionnels qui rechignent à faire les efforts de communication et de vulgarisation que cela nécessiterait, sans compter les investissements pour équiper les centres de location du matos de qualité nécessaire pour proposer cette activité, en comparaison de ce qu’il faut pour la raquette.
Je pense que les professionnels devraient justement investir dans ces équipements pour diversifier leurs offres et ainsi remplir les nombreux hébergements vacants. Ils ont bien investi dans des dameuses qui servent de moins en moins souvent, parfois dans des canons à neige dont les possibilités de fonctionnement sont aléatoires et dont l’empreinte écologique est non négligeable.
Mais il y en a qui le font :
Pour conclure (ce long discours), je pense que ce qui pourrait pousser au développement du SRN (si tant est que cela soit réellement souhaitable) c’est, pour ne pas dire de la publicité, une grosse communication.
Je ne connais pas le contenu des formations d’accompagnateurs montagne ou moniteurs ski mais je suppose qu’il n’y a pas de module obligatoire SRN (peut-être même que certains ne connaissent pas) ; ce serait un minimum.
Après, il y a les grands organismes comme le CAF : ils proposent raquettes ou SRA mais à priori pas SRN.
Régis et sa petite équipe œuvrent pour porter haut et fort le flambeau (organisation de petits évènements, intervention dans des racines et des ailes (ou qqch comme ça) mais il doivent parfois se sentir bien seuls.
Quant à ce podcast, je ne sais pas comment on tombe dessus si on ne consulte pas le site SRN ou si on n’est pas passionné de ski de fond ?
Comme avec Vincent l’an dernier sur le plateau d’Ambel, nous avons souvent croisé (ou doublé) des raquetistes surpris de nous voir à cet endroit avec des skis de fond !!! Comme on n’est pas complétement sectaires , on leur parle et leur explique que ce ne sont pas tout à fait des skis de fond : ils découvrent alors que le SRN ça existe ! Ce qu’ils font de nos paroles ? Compte tenu de la pauvre offre de location, certainement pas grand-chose…
Bravo à ceux qui m’ont lu jusqu’au bout !